Par un arrêté publié au Bulletin Officiel le 13 avril dernier, le Ministre de l’Education Nationale a revu à la baisse les pouvoirs du Conseil des sages de la laïcité qui ne pourra désormais qu’agir sur saisine du Ministre et ne pourra intervenir dans les établissements qu’à la demande des recteurs. Le mandat de ses membres a aussi été réduit, de façon à en redéfinir rapidement sa composition.
Raphaël SCHELLENERGER a cosigné la lettre des députés Les Républicains au Ministre de l’Education Nationale :
Monsieur le ministre,
Comment ne pas vous faire part de notre grande inquiétude et de notre incompréhension au moment où vous avez choisi de redéfinir la composition et les missions du Conseil des sages de la laïcité ?
Créée en 2018 par votre prédécesseur Jean-Michel BLANQUER pour « préciser la position de l’institution scolaire en matière de laïcité et d’enseignement laïque des faits religieux », cette instance avait montré des signes d’efficacité, et apportait, malgré les difficultés, des réponses beaucoup plus précises qu’auparavant aux interrogations que pouvaient se poser les équipes sur le terrain en matière d’habillement, d’alimentation ou encore de programmes.
Comment comprendre l’inflexion brutale que vous avez choisi d’imposer au Conseil des sages de la laïcité, au moment où les chefs d’établissement se sentent souvent bien seuls, où les acteurs de terrain ont tant besoin de réponses concrètes, où tant de faits ne sont déjà pas remontés comme le soulignait le 8 mars dernier une enquête du SNPDEN-UNSA, principal syndicat des chefs d’établissement ?
Face à ces difficultés, vos choix interpellent, car tout démontre que vous avez décidé de procéder non pas à une simple reprise en main, mais bien à une dénaturation profonde de sa vocation initiale :
– Nomination, d’abord, de nombreux nouveaux membres, dont celle du sociologue Alain POLICAR qui se dit opposé à une « laïcité répressive » ou « de combat », à l’heure où toute notre énergie devrait être mise à sa défense ferme et résolue ;
– Modification, ensuite, des attributions du Conseil, qui ne pourra plus être saisi directement par les chefs d’établissements, mais uniquement par le ministre qui aura tout le loisir d’étouffer certains dossiers ;
– Dilution, enfin, de la mission-même du Conseil, qui n’est plus chargé de suivre la seule laïcité mais de lutter contre toutes les formes de discriminations, notamment sur la base de la race ou du sexe.
Cette décision apparaît tout à la fois comme une opération de mise au pas, de mise sous tutelle, de déconstruction et de dévoiement du Conseil des sages de la laïcité.
Une seule chose est sûre : vos choix choquent profondément, bien au-delà des clivages politiques. Ils suscitent déception, incompréhension et même colère.
Jean-Eric SCHOETTL, ancien secrétaire général du Conseil constitutionnel, qui en était membre, vient de présenter sa démission.
Mickaëlle PATY, sœur de Samuel PATY, vient de publier une tribune, où elle vous reproche même de vouloir « assassiner la laïcité ».
A l’Assemblée nationale, les députés Les Républicains ne vous ont jamais fait de procès a priori, mais vous nous devez la clarté, comme vous la devez à chaque Français, et plus encore à chaque parent qui confie son enfant à l’Ecole de la République.
En tant que parlementaires, nous attendons donc de vous, Monsieur le ministre, des réponses à ces questions précises :
– Que reprochiez-vous concrètement et factuellement au Conseil des sages de la laïcité ?
– Pourquoi ne pas reconnaître la singularité des atteintes à la laïcité que vous diluez aujourd’hui dans d’autres combats ? « Mal nommer un objet, c’est ajouter au malheur du monde », écrivait Albert Camus en 1944. Pourquoi ce grand brouillage intellectuel qui ne peut qu’être préjudiciable à la réponse politique que nous devons apporter aux attaques qui menacent la laïcité ?
– Pourquoi couper le Conseil des sages de la laïcité des remontées de terrain que pouvaient lui apporter directement les chefs d’établissements ? Comment ne pas y voir une tentative de mettre sous le tapis les difficultés, alors que tous les chiffres fournis par votre propre ministère ces derniers mois montrent bien les fortes attentes du terrain ?
Vous remerciant de l’attention que vous saurez apporter à notre demande, nous vous prions d’agréer, Monsieur le ministre, l’expression de nos respectueuses salutations.
Alexandre PORTIER
Député du Rhône
Olivier MARLEIX
Eric CIOTTI
Michèle TABAROT
Patrick HETZEL
Annie GENEVARD
Emmanuelle ANTHOINE
Thibault BAZIN
Jean-Yves BONY
Xavier BRETON
Hubert BRIGAND
Fabrice BRUN
Dino CINIERI
Josiane CORNELOUP
Marie-Christine DALLOZ
Francis DUBOIS
Pierre-Henri DUMONT
Jean-Jacques GAULTIER
Philippe GOSSELIN
Victor HABERT-DASSAULT
Mansour KAMARDINE
Véronique LOUWAGIE
Alexandra MARTIN
Frédérique MEUNIER
Yannick NEUDER
Eric PAUGET
Isabelle PERIGAULT
Nicolas RAY
Vincent ROLLAND
Raphaël SCHELLENBERGER
Jean-Pierre TAITE
Vincent SEITLINGER
Antoine VERMOREL-MARQUES
Isabelle VALENTIN
Pierre VATIN
Jean-Pierre VIGIER
Stéphane VIRY
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